Marie-Josee Denis
Ostéopathie Naturopathie
Sujet d’actualité pour le moins brûlant, le cannabis suscite beaucoup l’attention, surtout depuis la nouvelle légalisation autorisant son usage récréatif. Toutefois, son usage à des fins thérapeutiques demeure peu connu du grand public. Pourtant, il se fait à l’heure actuelle des percées scientifiques qui s’avèrent prometteuses.
xx
Mise en contexte
Intriguée par les nombreuses vertus médicinales de cette plante, je me suis entretenue avec Véronique Lettre, diplômée de la THC University, au Colorado, copropriétaire de Nature Médic, basée à Magog et comptant parmi les premières cliniques de cannabis thérapeutique au Québec. Auteure de livres à succès, Véronique Lettre vient tout juste de publier, soit en octobre 2018, Le cannabis médical. Le connaître et l’utiliser : « On entend plus souvent parler du THC (tétrahydrocannabinol) et de son effet euphorisant; on connaît très peu le CBD (cannabidiol) aux vertus anti-inflammatoires et antidouleurs utilisé pour soulager un grand nombre de pathologies. Tandis que sur le plan thérapeutique, le THC est reconnu pour stimuler l’appétit et favoriser le sommeil. »
xx
Il faut savoir que, depuis 2016, il existe des milliers d’usagers soutenus par le gouvernement canadien. En effet, ce dernier finance le cannabis thérapeutique prescrit aux anciens combattants qui en font la demande, et ce, pour traiter leurs douleurs chroniques et leurs syndromes de stress post-traumatique. Aujourd’hui, 6300 vétérans au Canada bénéficient de ce programme.
xx
Ce faisant, l’adoption récente du Règlement pour l’accès au cannabis à des fins médicales s’accompagne d’une revue de littérature scientifique recensée par le gouvernement canadien. Celle-ci vient souligner les bienfaits du cannabis pour traiter les divers symptômes de plusieurs maladies et affections : cancer, arthrite, arthrose, douleurs chroniques, fibromyalgie, parkinson, épilepsie, dystrophie musculaire, sida, maladie de crohn, dépression, glaucome, migraines, sclérose en plaque, hépatite C, TDHA, de même qu’anorexie et boulimie.
xx
Aussi, les travaux de recherches scientifiques gagnent en qualité depuis quelques années. Certaines études démontrent que le cannabis médical présente des standards élevés de qualité, de constance et de sécurité, au même titre que d’autres produits pharmacologiques.
xx
Par ailleurs, depuis 2016, le cannabis offert sous forme d’huile est autorisé au Canada, une méthode d’ingestion jugée plus saine que l’inhalation, laquelle peut s’avérer dommageable pour les poumons.
xx
Enfin, les nouvelles recherches nous apprennent qu’il existe plus d’une centaine de cannabinoïdes outre le THC et le CBD. Par exemple, le CBG qui, à l’instar du CBD, est non psychoactif. Vu ses propriétés analgésiques et antibiotiques, le CBG pourrait soulager le psoriasis, de même que la douleur et l’inflammation. Pareillement le CBC , qui serait doté d’effets semblables, anti-dépresseurs et antifongiques en sus.
xx
Il était une fois le cannabis
Déjà, en Asie, aux environs de quatre mille ans avant Jésus-Christ, le chanvre était cultivé. Il aurait été introduit dans la médecine occidentale vers 1840 par un médecin d’origine irlandaise, William O’Shaughnessy, lequel avait découvert ses vertus en Inde, où il avait exercé comme médecin et scientifique. Or, le cannabis était un médicament des plus vendus à l’époque; même la reine Victoria l’utilisait pour soulager ses douleurs menstruelles. La popularité du chanvre aurait décliné avec la production de nouveaux médicaments comme l’aspirine. C‘est en 1937 que les Etats-Unis ont déclaré le cannabis drogue illicite.
xx
Et c’est Israël qui est aujourd’hui le leader mondial en recherche médicale. Au cours des années 70, le professeur Raphael Méchoulam y découvrait la molécule de THC. Des hôpitaux, des universités et des entreprises pharmaceutiques appuient maintenant les recherches, médecins et pharmaciens souhaitant bientôt prescrire et vendre le cannabis médical.
xx
Histoires à succès : cas vécus
Étonnamment, les premiers cas reconnus sur le plan thérapeutique concernent des enfants en bas âge. Comme Charlotte Figi, 5 ans, qui depuis l’âge de 3 mois était atteinte du syndrome de Dravet et qui pouvait faire jusqu’à 300 crises d’épilepsie par semaine. Lesdites crises ont commencé par diminuer, pour finalement disparaître après administration de l’huile thérapeutique de cannabis.
xx
Un autre cas fut celui d’une enfant de 2 ans, Landon Riddle, atteinte d’une forme agressive de leucémie. Le remplacement des opiacés et de la morphine par l’huile de cannabis encourt des effets quasi miraculeux sur la santé de l’enfant. Progressivement les globules rouges et blancs de Landon augmentent. Six mois plus tard, encouragée par ces résultats, la mère cesse la chimiothérapie. Aujourd’hui âgé de 7 ans, Landon est en bonne santé et n’a pas subi à ce jour de récidive du cancer.
xx
En Californie, auprès d’un enfant de 8 mois, le docteur William Courtney a traité une tumeur inopérable au cerveau. N’ayant plus rien à perdre, le père de l’enfant décida d’enduire d’huile de cannabis la suce de l’enfant, à raison de deux fois par jour, en augmentant graduellement la fréquence. Au bout de deux mois, la tumeur avait diminué de manière significative. Après huit mois, la tumeur s’était résorbée de façon radicale.
xx
CBD, alimentation et vitamines : une formule gagnante
Rapportée sur un blogue en novembre 2018, voici l’histoire d’Anat Avisar Koren, une femme de 37 ans, enceinte et atteinte de sclérose en plaque. Elle qui se déplaçait en fauteuil roulant s’est mise à étudier le domaine de la nutrition et des compléments alimentaires. En quelques mois, elle développa une combinaison alimentaire faite de vitamines et d’huiles de CBD qu’elle a par la suite ingérées. Les résultats ont été spectaculaires, au point qu’elle a pu retrouver sa mobilité et marcher à nouveau. Puis, Anat Avisar Koren tenta l’expérience auprès de 1349 patients atteints de maladies auto-immunes (sclérose en plaque, polyarthrite rhumatoïde, maladie de crohn, asthme et vascularite), de même qu’un groupe témoin concernant la fibromyalgie. Les résultats furent une amélioration substantielle de la santé des patients quant au sommeil, à la douleur, à la mobilité, l’appétit et la fatigue. Prochainement, elle ira témoigner de son vécu et présenter ses résultats au Congrès de la sclérose en plaques, à Amsterdam.
xx
Nouvelles données scientifiques
De récentes études révèlent que notre métabolisme comprend un système d’endocannabinoïdes jouant un rôle important dans le mécanisme de la douleur et qui aurait pour effet de créer un meilleur équilibre entre le corps et l’esprit.
xx
Depuis notre tendre enfance, notre alimentation nous procure les endocannabinoïdes. On en trouve énormément dans le lait maternel entre autres, de même que dans les Oméga 3, étant surtout présents dans les acides gras des aliments.
xx
Ainsi, le système endocannabinoïde serait à l’origine de l’homéostasie, le processus de régulation assurant le fonctionnement normal de l’organisme. Ce mécanisme aurait une influence sur les fonctions essentielles du corps humain, tels la faim, la digestion, la douleur, l’énergie, le sommeil, l’appétit, les fonctions motrices, les fonctions reproductrices, le plaisir, la régulation de la température corporelle…
xx
Cépage ou souche de cannabis
Selon Véronique Lettre, « le cannabis c’est un peu comme le cépage, il y a autant de souches pour le cannabis que de cépages pour le vin». Ces variétés sont classées par familles : Sativa, Indica et hybride. Les sativas sont reconnues pour leur effet stimulant à prendre en matinée et sont recommandées pour soigner la dépression et la fatigue chronique; tandis que les indicas offrent un effet relaxant à prendre en soirée, notamment pour combattre le stress et favoriser le sommeil.
xx
Fournisseurs et réseau de vente du cannabis au Canada et au Québec
Rappelons qu’au Canada, les cliniques médicales ne sont pas autorisées à vendre du cannabis. Seuls les producteurs autorisés par Santé Canada ont le droit de vendre des produits du cannabis à des fins médicales. On en compte plus d’une centaine au Canada. Leurs produits sont vendus en ligne sur preuve d’une ordonnance médicale ou d’un historique médical démontré. Les points de vente physiques ne sont pas autorisés; toutefois, avec la légalisation du cannabis pour usage récréatif, certains produits sont rendus disponibles en vente physique à la Société québécoise du cannabis (SQDC). Mais il faut faire la file…
xx
Premières cliniques médicales légales au Québec
En janvier 2018, à Magog, Nature Médic, clinique de cannabis thérapeutique, ouvre ses portes. Puis, depuis quelques mois à peine, une autre voit le jour à Granby. Santé Cannabis , elle, offre quatre points de service, soit deux dans la région de Montréal, une autre à Sherbrooke et une autre à Québec. Un volet de recherche s’y rattache. Autre caractéristique, des médecins oeuvrent sur place au sein de ces cliniques. Par ailleurs, d’autres cliniques existent toutefois elles fonctionnent par SKYPE avec des médecins hors-Québec lesquelles ne sont pas en règle avec le Collège des Médecins.
xx
Conclusion
Nous sommes encore au balbutiement des recherches sur le cannabis et ses effets thérapeutiques. Mais déjà, suite à son utilisation, les récentes observations cliniques permettent de constater un soulagement des symptômes de la douleur, des tremblements, des spasmes, de l’inflammation, lesquels sont communs à plusieurs pathologies (sclérose en plaque, maladies de la moelle épinière, fibromyalgie, dépression). Le cannabis peut en outre stimuler l’appétit, voire engendrer un gain de poids chez les patients atteints du SIDA. Finalement, la littérature et les observations cliniques semblent unanimes quant au soulagement des symptômes sans encourir, outre mesure, des effets secondaires, certes un atout de taille. Dans cet optique, on comprend l’intérêt d’autres pays d’Europe pour les avancées canadiennes.
xx
Un bémol cependant. Comme le cannabis se trouve associé à des effets euphorisants, cette réputation semble créer une résistance auprès du public quant à son utilisation à des fins purement thérapeutiques. Autre part d’ombre, l’existence de certains risques néfastes, notamment ceux associés à la santé mentale. Pensons aux craintes soulevées par la communauté scientifique concernant les jeunes de moins de 25 ans quant aux effets potentiellement négatifs du cannabis sur les jeunes cerveaux en développement. Autre malaise est le fait qu’il existe un seul réseau d’achat pour deux marchés distincts, soit l’usage récréatif d’une part et celui médicinal d’autre part.
xx
Quelques sources intéressantes :
Comprendre le nouveau règlement sur l’accès au cannabis à des fins médicales
xx
Consommation du cannabis à des fins médicales
xx
Producteurs autorisés de cannabis à des fins médicales (par Santé Canada)
xx
Le site blog-cannabis.com offre différents articles d’intérêt axés sur les bénéfices du cannabis médical, les souches, l’actualité, les événements et les découvertes récentes. (Etats-Unis, Europe, France et ailleurs dans le monde)
xx
xx
Mes remerciements les plus chaleureux vont à Véronique Lettre, copropriétaire de Nature Médic créée en janvier 2018, une des premières cliniques de cannabis thérapeutique à l’extérieur de Montréal (Magog). Véronique Lettre a donné plusieurs formations auprès du grand public de même qu’auprès de professionnels de la santé.
xx
Le contenu de cet article s’inspire grandement du livre Le cannabis médicinal. Le connaître et l’utiliser. Cuisiner le beurre et l’huile de cannabis, Les Éditions du Trécarré. Octobre 2018. Une lecture que je recommande hautement.
Marie-Josée Denis, Naturopathe au Plateau et à NDG
xx
Références
1 Règlement pour son usage récréatif ainsi que celui à des fins thérapeutiques
xx
xx
xx
4 Lettre, Véronique : Plus fou que ça…tumeur : 2010, Stanké. Les aventures de Jack et Joe : 2015, Libre expression
xx
5 Lettre, Véronique : Le cannabis médical. Le connaître et l’utiliser. Cuisiner le beurre et l’huile de cannabis. Octobre 2018. Trécarré, p.41
xx
6 Sources : Ministère des Anciens combattants et .nada.ca/nouvelle/1074171/cannabis-medical-veterans-autorisations-medicales. Pour la période allant du 1 er avril au 30 novembre pour 2017-2018. Rapporté dans le livre cité à la note 2, p.40.
xx
7 https://www.canada.ca/fr/sante-canada/sujets/cannabis-fins-medicales.html
xx
8 Le ministère de la Santé du gouvernement canadien a créé un département ayant pour mandat d’encadrer la légalisation et la réglementation du cannabis et des cannabinoïdes à des fins médicales. Ce dernier a publié un résumé d’articles scientifiques et de revues scientifiques internationales examinés par les pairs (experts) sur les utilisations thérapeutiques possibles. Les effets néfastes du cannabis et des cannabinoïdes sont également considérés.
xx
9 Rapportée et résumée par Véronique Lettre dans son livre, p.35. Voir note 2.
xx
10 Claude Latulipe, Préface du livre : Le cannabis Médical, p.18, voir note 2, Infirmière praticienne impliquée dans un projet de recherche mené par l’Université McGill en 2015. Elle a assuré le suivi médical de plus d’une centaine de patients usant du cannabis médical.
xx
11 voir note 2, p.60
xx
12 Idem
xx
13 Idem p.49
xx
14 Le Marihuana Tax Act, un lobby de sociétés privées qui seraient à l’origine de cette interdiction malgré l’opposition de quelques-uns, dont l’Association médicale américaine, p.50
xx
15 Ces cas sont rapportés et très bien décrits dans le livre de Véronique Lettre. Voir note 2, p. 35 et s.
xx
16 www.blog-cannabis.com/2018/11/21/cbd-et-vitamines-maladies-auto-immunes/
xx
17 note 2 p.41
xx
18 www.newsweed.fr/systeme-endocannabinoide/
xx
19 idem
xx
20 En voici quelques-uns : Aphria.ca, Auroramj.com,shop.spectrumcannabis.com, cannafarms.ca,medreleaf.com,neptunecorp.com, organigram.ca, thehydropothecary.com